Altolamprologus sp. compressiceps shell "sumbu"


Le Lac Tanganyika

Je ne sais pas si c'est un poisson à la mode chez les Tanganyikophiles (notamment les débutants), mais on peut lire beaucoup à son sujet ces derniers temps sur le ouaib (de tout et n'importe quoi d'ailleurs pour pas changer ! Qu'on se le dise !). On le propose à de nombreux débutants, à certaines personnes qui possèdent des bacs de tailles restreintes et qui souhaitent rajouter quelques colocataires à leurs écailles préalablement acquises... Pourquoi tant de convoitise ? Et bien c'est justemment ce que nous allons essayer de comprendre à travers cet article.

Son histoire... description...

Cette espèce n'est pas encore décrite mais par son profil morphologique, il est très facile de se faire une petite idée à ce sujet. Un corps relativement haut, une tête très comprimée plus longue que haute, pas de doute il s'agit bien d'un Altolamprologus ! Oui, oui, une miniature de son proche cousin le compressiceps d'où son nom "transitoire" compressiceps shell ! On dénombre actuellement environ 6 variétés "géographiques" de forme naine de compressiceps situées tout autour du lac mais plus de la moitié se situe en Zambie (Probablement la meilleure zone pour trouver des formes "évoluées", majoritairement naines mais aussi chromatiques (+ commun dans le lac )... Ces espèces ont donc su évoluer et s'adapter à leur nouveau biotope). La grande différence avec les grands Altolamprologus compressiceps réside dans leur taille adulte, en effet, on tourne autour du facteur 1/2, soit une taille moyenne de 7 cm pour les mâles et 5 pour les femelles. Ceci constitue d'ailleurs le fait marquant de leur évolution et aura plusieurs conséquences sur le comportement de l'espèce.

Il est à noter que très peu d'Altolamprologus de forme naine sont disponibles dans le commerce aquariophile, ils restent donc rarement proposés à la vente. Tous sauf un qui est régulièrement diffusé par les éleveurs amateurs mais aussi quelques magasins isolés ou importateurs, il s'agit de l'Altolamprologus sp. compressiceps shell de Sumbu. Peut-être pas le plus beau, je vous l'accorde, mais ça n'enlève rien à son charme. ;-) Un poisson tout en nuance de blanc, beige, gris et de noir avec quelques petits reflets agréables de temps à autre... (Tite parenthèse, le premier qui dit que le Tanganyika c'est un peu comme un vieux noir & blanc de 1920 je le matraque). Les mâles, plus grands que les femelles, présentent une robe également plus foncée qui tire vers le noir avec parfois des reflets bleu nuit au niveau de la dorsale, anale et des pelviennes. Les pectorales sont quant à elles légèrement orangées à la base. La femelle, tout comme le mâle mais de manière plus prononcé, a une coloration qui varie suivant son humeur, elle peut varier du gris beige au blanc presque pur, rehaussé de stries verticales irrégulières d'un noir intense.

Comment les maintenir dans des conditions adéquates...

Comme précédemment expliqué, c'est un Altolamprologus de forme naine, qui de plus, est conchylicole (niche dans des coquilles). Sa taille relativement modeste permet de le maintenir dans des bacs de faible volume, pas non plus une boule à poisson rouge ! Tout est relatif ! Personellement, je ne suis pas d'accord sur le fait de les maintenir dans un bac de 65L en couple même si certaines personnes le font avec pas mal de réussite. Le must reste d'aménager pour madame et monsieur, un bac de 120L ou au pire de 96L. Quelques grosses coquilles d'escargots de bourgogne par-ci par-là, un substrat de très faible granulométire, de préférence du sable identique à celui vendu pour les bacs à sable, un petit tas de schistes dans un coin du bac, et voilà le bac est enfin prêt pour accueillir un couple de "Sumbu" ! Ce n'est pas un poisson difficile, il est vrai qu'on peut le conseiller à un débutant en Tanganyika. De la rigueur au niveau de l'hygiène (changement d'eau régulier), une nourriture adaptée, une bonne qualité d'eau (même si l'eau de conduite peut convenir, je n'en suis plus fan !) et tout devrait bien se passer au niveau de la maintenance !


Couple d'Altolamprologus sp. compressiceps shell "sumbu"

Au niveau de la cohabitation, un couple d'Altolamprologus sp. compressiceps shell "sumbu" peut facilement cohabiter avec des espèces pétricoles du genre Neolamprologus, Julidochromis dans des bacs d'environ 200L. Dans de plus grand bac on peut le faire cohabiter avec de tout (Cyprichromis, sabulicoles...) sauf peut-être avec les énormes espèces prédatrices... Par ailleurs, il vaut mieux ne pas mélanger ces benthivores avec des espèces à régime herbivore. Il y a un point sur lequel, par contre, je ne suis pas trop d'accord, c'est au niveau de la cohabitation dans de trop petits bacs avec une deuxième espèce de conchylicole (notamment dans le genre multifasciatus). Je m'explique, les "sumbu" aiment être tranquilles lorsqu'ils fraient. Une fois la ponte, la femelle reste toujours dans la coquille, seul le mâle monte la garde ! Le problème avec la colonie de Neolamprologus multifasciatus, c'est qu'ils n'ont peur de rien... au final ils parviennent toujours à rester dans les coquilles limitrophes à celle choisie par la femelle. Les coups de gueule du mâle n'y feront rien ! Les multis sont tétus ! Bref la femelle agassée peut dévorer sa ponte. Si les oeufs éclosent, les petits Neolamprologus squatteurs des coquilles restant à l'affus se feront un plaisir à gobber les bébés.

Comportement ... :

Niveau comportement, les Altolamprologus nains, dans notre cas, ceux de Sumbu, restent relativement calmes avec les autres pensionnaires du bac.

Par contre, niveau intraspécifique, c'est un peu différent :

- les rivalités entre mâles se limitent à des parades d'intimidation : les poissons, nageoires déployées se mordillent les flans qui sont de véritables cuirasses !

- les femelles sont bien plus agressives entre elles que les mâles. Je trouve personellement la femelle beaucoup plus caractérielle ! Elle y va franco! Bam coup de gueule ! Bref, généralement quand son mâle a une petite embrouille avec le voisin de palier, c'est elle qui porte le coup décisif. D'ailleurs les femelles ne se font pas trop de cadeaux entre elles, même si elles ne se tabassent pas à mort, quelques écailles peuvent parfois sauter.

D'après un reproducteur d'Altolamprologus sp shell "Sumbu", il semblerait qu'il soit presque impossible de reproduire deux couples de Sumbu ensemble dans un bac avec une faible surface de sol. En effet, si les deux pontes n'ont pas lieu en même temps, on peut être quasi certain que celle ci échouera à cause de la prédation du deuxième couple ! Par contre, si par chance les deux couples pondent en même temps, le taux de survie devient alors proche des 80% !

... et nourriture :

En milieu naturel, c'est un poisson benthivore qui est très friand de Crevettes mais aussi Copépode, larves de Chironomidae, Ephemeroptera et également un prédateur occasionnel ou plutôt opportuniste ! En aquarium, ils rafflolent du Krill. On peut également lui donner des cyclopes, quelques fois du Mysis, des Artemias et même quelques alevins de guppys, ils adorent ! On peut même observer le comportement de chasse spécifique aux Altolamprologus (seul le mâle semble chasser chez les Sumbus). Lorsque la proie est au raz du sol, le mâle, très observateur, est alors à quelques centimètres du dessus du sol, s'incline jusqu'à être perperdiculaire au substrat ! Et bam ! Bon quelque fois il se manque mais le spectacle en vaut la peine !

Le reproduction :

Pas très facile au final ! Les pontes se déroulent à intervale irrégulier. Cependant, elle est assez prévisible, la femelle, ventre rebondi, reste généralement à l'embouchure d'une coquille qu'elle choisit. Par ailleurs les parades s'intensifient, le mâle et la femelle frétillent de tout leur corps et de manière très vive (mouvement du corps latéral très vif) et on peut voir la femelle qui invite le mâle à l'accompagner dans sa coquille. Généralement la ponte suit quelques jours après, jusque là rien de problématique... Le plus délicat reste le nourrisage des jeunes ! En effet, les tout jeunes alevins sont relativement maladroits et on se doit de leur donner très régulièrement des nauplies. Ils ne se déplacent pas pour aller les chercher ! Il faut donc absolumment qu'elles passent près d'eux pour qu'ils puissent se nourrir ! Si l'eau est bien en mouvement et que les nauplies sont distribuées près de la coquille (grâce à une seringue par exemple), il ne devrait pas y avoir de problème. Dans de bonne condition, les jeunes grandissent lentement mais suremment ! Il faut vraiment être patient car la croissance est très très lente !



Texte et photos : Jonathan Bouquerel