La reproduction des haplochrominiens: observations aquariophiles

Généralités :
Les espèces cichlidés haplochrominiennes sont des incubateurs buccaux maternels, C’est à dire que seule la femelle garde dans sa bouche les oeufs et les embryons pendant la durée d’incubation. Le mâle ne joue aucun rôle à part celui de géniteur pendant la phase de fécondation des oeufs. Pour cette raison, essayez, tant que possible, de mettre plusieurs individus et non un couple isolé.

Quant une femelle ou un groupe de femelles sont gravides, elles se déplacent de territoires en territoires à la recherche de mâles géniteurs. Dans un aquarium, les femelles gravides au lieu de fuir le mâle, stationnent à la limite de son territoire.

Le mâle se présente alors en biais face à elle, toutes nageoires déployées, la tête orientée vers le substrat. Il vibre plus ou moins énergiquement deux ou trois fois devant la femelle, lui présentant ses flancs et ses ocelles. Il peut alors faire un aller-retour en forme de 8 avec ses nageoires déployées en créant un dépression avec toute l’énergie de son corps et de sa nageoire caudale. Elle est suffisamment puissante pour faire bouger la femelle qui est obligé de se stabiliser en bougeant plus rapidement ses nageoires pectorales.

Puis de nouveau, le mâle se place en biais, expose ses flancs et ses ocelles au maximum de leur intensité lumineuse. Il présente alors une robe aux barres mélaniques prononcées et une coloration corporelle au maximum de son intensité.

L’angle que prend le mâle peut être différent suivant les espèces, de presque 45° à une position pratiquement horizontale. Cette posture peut être suivie d’une nage pilote ou nage en papillon qui sert au mâle à attirer la femelle sur le lieu de reproduction.

Cette nage pilote peut être relativement différente suivant les espèces, certaines sont amples avec des mouvements corporels "exagérés" par ex: H.nyerereï, d’autres sont plus "sèches" et plus rapides avec par exemple H.piceatus.. Ces danses nuptiales semblent variable à l’intérieur même d’espèces de même groupe trophique. H.chilotes et H.chromogynos. ont des variations minimes suffisament différentes pour ètre visible à l’observateur averti.


Scène de reproduction d'un couple d'Haplochromis nuchisquamulatus :
Photos de Philippe Blé





















Les ocelles semblent jouer un rôle important dans la reconnaissance des partenaires et lors de la nage pilote, elles semblent jouer le rôle d’un "phare lumineux" pour guider la femelle sur le site de ponte.

Ces sites de ponte semblent être différents. Certaines espèces creusent des dépression en forme de cratère dans le sable par ex: H.piceatus, d’autres pondent à l’intérieur de grottes par ex: Pundamilia macrocephala, d’autres encore pondent sur des pierres plates prés de la surface ou prés de plantes par ex: H.obliquidens. Il semble que ce soit les femelles qui choisissent le partenaire avec qui s’accoupler, chez H . argens une femelle peut pondre au milieu de plusieurs mâles alors que d’autres ne pondent qu’avec un seul mâle par ex; P.macrocephala.. Certaines autres pondent quelques oeufs avec un mâle puis vont pondre avec d’autres juste après par ex: H.chilotés

Chez toutes ces espèces, la phase de ponte et de fécondation des oeufs s’appelle phase en position "T". C’est à dire que la femelle place sa bouche au niveau de la nageoire anale et de l’orifice génitale du mâle en cherchant à prendre dans sa bouche les oeufs factices ou ocelles, celui-ci lâche le liquide séminal au même moment. Juste avant le lâcher de sperme, le mâle en biais, fait vibrer son corps et sa nageoire plus rapidement, en se penchant, la tête inclinée vers la surface. Cela semble avoir un effet focalisateur sur l’attention de la femelle et déclencheur de la ponte. Puis le mâle et la femelle tournent en échangeant de place, le mâle stimule sa compagne par de petits mouvements de la bouche au niveau du ventre, la femelle dépose les oeufs pendant qu’ils tournent et les prend en bouche dés qu’elle les aperçoit.

La fécondation peut s’effectuer aussi bien dans la cavité buccale de la femelle qu’en dehors de celle-ci. La phase de fécondation peut être également variable dans les mouvements des individus et le temps qu’elle dure. Elle peut varier entre espèces et entre individus d’une même espèce. Certaines femelles semblent plus attentives alors que d’autres s’éloignent à la moindre perturbation.

La femelle va remplir entièrement d’oeufs sa cavité buccale jusqu’à avoir une gorge complètement distendue. Elle quitte alors le territoire du mâle et ne le suit plus. Certaines femelles vont incuber dans des grottes, d’autres prés de la surface, d’autres encore cachées sous une feuille, elles choisissent en général un endroit tranquille.

Le temps d’incubation peut également varier suivant les espèces et la température. Une moyenne de quinze jours à 25° C semblent raisonnable mais il vaut mieux isoler la femelle si on désire garder la progéniture. En effet, certaines femelles ont tendance à prolonger trop longtemps l’incubation si elles ne trouvent pas d’endroit suffisament calme pour relacher les petits. Les alevins dans ces cas sont trop affaiblis, ils auront du mal à survivre et la plupart d’entre eux risquent de mourir. Après l’incubation proprement dite, vient la période post-incubatoire, période pendant laquelle la femelle reprend en bouche ses alevins dés le moindre signe de danger. La durée de ces soins post buccaux peut être très variable suivant les groupes trophiques de 7 à 10 jours pour les insectivores pétricoles, elle semble être de 2 à 4 jours chez les zooplanctivores pélagiques et certains sabulicoles. Certaines femelles de pétricoles défendent la grotte ou sont leurs jeunes pendant cette période en chassant tout poisson qui s’approche. Elles se nourrissent pendant cette phase, les jeunes se plaquent alors sur le sol et ne bougent plus. Ils deviennent pratiquement invisibles aux yeux des prédateurs.

Pour être sûr de ne pas avoir d’hybrides, il vaut mieux placer les adultes en bacs monospécifiques de reproduction avant de les mettre en bac d’ensemble. En aquarium communautaire, il vaut mieux garder les petits en sortant les femelles incubantes dont on a assisté aux pontes( ceci est primordial si on ne veut pas élever d’hybrides).

En bac d’ensemble, il y a toujours des alevins qui survivent, mais comme on ne peut être sûr qu’ils ne sont pas hybrides, il vaut mieux les sortir du bac quant ils sont adultes et reconnaissables. De fait un hybride présente une morphologie intermédiaire entre les 2 parents par exemple 5 barres d’un coté 3 de l’autre, forme d’un parent avec couleur de l’autre, etc.. Si le poisson ne ressemble en rien à ce que vous maintenez, il vaut mieux le sacrifier.

Pour éviter l’hybridation, mieux vaut élever les alevins dans des bacs monospécifiques, elle parait alors ne presque plus avoir lieu quant ils deviennent adultes. L’hybridation semble également dépendre de la taille et de la couleur des ocelles, elle semble plus fréquente avec des individus présentant le même schéma de disposition et la même couleur.

Il vaut mieux éviter de laisser des femelles sans mâles de leur espèce en bac d’ensemble ainsi que des espèces ou des formes proches par ex P.nyerereï et P. »red head » ou des poissons se ressemblant par le patron de coloration corporel par ex: P.nyerereî et H sp. ".flameback " L’hybridation ne semble pas beaucoup plus importante que chez les poissons du lac Malawi, maintenir les cichlidés du Victoria dans de grands aquariums permet de se rendre compte de la complexité des rapports sociaux entre individus et entre espèces et limite de fait l’hybridation en permettant à chacun de touver sa place et son partenaire sexuel dans l’aquarium.

Texte : Christophe de Medeiros (AFC 1028.91)
Photos : Philippe Blé (AFC 0124.80)


NDLR : Christophe vous conseil l'association Haplochromis pour en apprendre plus sur les haplochrominiens.